Interview
Il y a de nombreux métiers liés directement à l'utilisation de la structure cristalline. Nous avons rencontré M. Follegot, qui a travaillé à Thomson Semiconducteurs et a ainsi utilisé les propriétés du silicium pour l'informatique. Voici son interview.
-
Quelle est votre formation universitaire ?
Tout d'abord ingénieur à l'INSA (Lyon) en spécialité génie physique des matériaux (5 ans), puis un doctorat d'ingénieur en physique du solide spécialité microélectronique (3 ans).
-
Pourquoi avoir fait le choix de ce domaine ?
Parce que la physique me plaisait. En choisissant la branche dans laquelle j'allais aller, je n'avais pas idée de la suivante.
-
Pourquoi avoir fait une thèse ?
Parce que j'en ai eu l'occasion.
-
Quel est votre parcours professionnel ?
Après ma thèse, j'ai été recruté dans 2 entreprises, Thomson Semiconducteurs et IBM. J'ai choisi Thomson. J'ai travaillé dans une usine à Aix en Provence où j'étais responsable/ingénieur des recherches et du développement. On faisait des composants en silicium : la Power Schottky (une diode avec faible chute de tension), la diode FRED, et des diodes haute tension. Ce sont des diodes que j'ai conçues avec une équipe.
-
Comment fabrique t'on un monocristal de silicium ? (voir fig. 1 ci-dessous)
On prend un germe de silicium que l'on plonge dans du silicium liquide dopé, puis on soulève ce germe à une vitesse assez lente en le faisant tourner sur lui-même pour former un lingot cylindrique. Ensuite, il est découpé en tranches que l'on polit pour éliminer les défauts mécaniques. Enfin, les plaquettes servent de socle pour faire les composants. Sur la plaquette, on fait pousser une fine de couche de monocristal de silicium moins dopée que la couche de base, pour ne pas altérer ses propriétés.
-
Pouvez vous nous décrire une journée type quand vous travailliez dans ce domaine ?
Il n'y a pas de journées types quand on est ingénieur. Quand on conçoit, on travaille avec les clients qui nous donnent les cahiers des charges des diodes. Avec ce cahier, on regarde si on peut obtenir un compromis. Ensuite on passe devant une commission de projet puis on décide du coût et du temps. Puis tous ensemble on décide si on fait le projet. Ensuite on entre dans une phase de recherches pendant laquelle on va concevoir des échantillons. On va faire des tests avec le silicium pour voir si le composant se comporte avec les caractéristiques demandées par le client. On essaie de trouver des compromis si ça ne répond pas à la demande, et on soumet au comité notre projet. Ceci s'effectue sur plusieurs mois, c'est pour cela que nous faisons chaque jour quelque chose de différent dans l'usine.
-
Travailliez vous en collaboration avec d’autres centres de recherche en France ou à l’étranger ?
Oui, à l'étranger, notamment pour les power Schottky. Nous avions besoin d'autres connaissances pour l'analyse des caractéristiques du siliçure, qui est un cristal de silicium avec du métal.
-
Quel est votre plus grand succès ?
Des diodes power Schottky. On avait atteint 100 millions de dollars de chiffre d'affaire avec ces diodes. J'en ai entièrement conçues.
-
Quelle est votre plus grande déception professionnelle ?
Je n'ai pas vraiment de déceptions, à part quand j'ai perdu le côté technique de mon travail quand je suis monté en grade.
-
Pensez-vous que les nanotechnologies soient les technologies du futur ?
Premièrement, avant que les nanotechnologies ne remplacent l'industrie actuelle de l'informatique, il s'écoulera du temps. On ne peut pas remplacer rapidement un système qui fonctionne bien par un autre, même si ce dernier marche mieux : non seulement cela nécessite du temps, mais en plus l'industrie du silicium a coûté suffisamment cher à construire, il faudrait lever beaucoup de fonds pour le remplacer. Il y a aussi un autre problème à soulever : l'impact des nanotechnologies sur l'humain. Les nanotubes, par exemple, sont des formes cristallines inexistantes dans la nature. Notre organisme ne sait pas gérer de tels objets.

Fig. 1 : représentation d'un monocristal de silicium en train d'être découpé en fines tranches destinées à fabriquer les composants électroniques.
(Source : https://www.irif.fr)